Seul au milieu de la forêt, Natsuki méditait, immobile, en position de garde, les bras devant lui. Le bruissement des feuilles était l'unique son qui venait troubler le silence des environs, comme si même les oiseaux s'étaient tut pour permettre à l'assassin un état de concentration optimal. Initialement, il avait opté pour le territoire rocailleux, celui où il s'entrainait le plus clair de son temps, mais très vite, il s'était rendu compte que les arbres lui apportaient bien plus, comme si leur aura facilitait sa focalisation. Exactement ce qu'il avait besoin.

Alors qu'il ouvrait les canaux conducteurs de reiatsu dans ses bras, laissant son énergie intérieur circuler plus librement, son esprit errait dans ses souvenirs de l'avant-veille, lorsqu'il s'était vu contrait de jouer les cobayes pour un kido qu'il voulait créer et parfaire. Il n'avait, au final, pas assisté à grand chose du déroulement, rien qu'il n'était en état d'enregistrer sur le moment en tout cas. Seul lui restait la sensation de l'énergie s'infiltrant dans son corps, sa matière particulière avant la nouvelle vague de souffrance qui le terrassa presque. La peur panique qui l'avait prit – peur probablement provoquée par le sort – ne fut au final rien en comparaison à la douleur de la dépossession de force. C'était donc précisément cette énergie qu'il devait réussir à reproduire. Il lui fallait faire le tri entre le reiatsu brut, converti en énergie physique pour prendre la forme du kido, et l'emprunte naturel du marchand, qu'il devait remplacer par la sienne dans les justes dosages. Kisuke lui avait aussi donné l'incantation, qu'il avait bien sûr déjà apprise par cœur, mais qui n'avait pas encore d'utilité. En effet, la formule a pour but de gorger de pouvoir l'énergie que l'on accumule pour lancer un sort, formule qu'il faut savoir ponctuer aux bons moments, sans quoi la réciter avait autant d'intérêt que de chanter sous la douche. Le Vice-Capitaine se souvenait de ses entrainements sur la voie du kido, où il avait tenté différentes méthodes de lancé, dont l'incantation rapide. Et il n'avait pas non plus oublié les résultats peu probants que cela avait donné... Aussi, pour le moment sa priorité était de malaxer son reiatsu jusqu'à réussir à lui donner la même forme que l'ancien Capitaine.

L'exploit était tout à fait à sa portée, car il disposait de deux atouts : son reiatsu avait la particularité d'être extrêmement malléable, et lui n'avait pas son pareil pour progresser dans le domaine dans lequel il s'investissait. S'il pêchait un peu dans le hado et le bakudo, c'était uniquement car il s'y entrainement moins, le kido ne lui apportant que peu d'avantages tactiques dans son travail au quotidien. Ce n'était pas pour autant qu'il le négligeait, il y accordait juste moins de temps. Son génie d'apprentissage avait bien sûr ses limites : il ne pouvait pas apprendre à lancer le 90ièm hado : Kurohitsugi en s'y consacrant corps et âme pendant quelques jours. Tout au mieux, dans le rythme du plus mauvais des Nécromanciens, soit une affaire d'une poignée d'années, mais au prix de sa condition physique, ce qu'il ne pouvait pas se permettre.

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Les bras tendu droit devant lui, pouces et index liés pour former un triangle de ses mains, paumes vers l'avant, l'énergie coulait à flot à travers ses muscles. Et chacune des pulsations du reiatsu, semblable à son rythme cardiaque, était accompagnée de la formule enseignée :

« Soleil noir ... Ténèbres du monde ... Obscurité de l'univers ... Englobez son corps. Lune rouge ... Abysses des cieux ... Astres nébuleux ... Frôlez son esprit. Unissez vous ! Relayez-vous ! Ne laissez aucun répit, aucune pitié ! Sentiments d'épouvante ! Visions d'horreurs ! Frayeur ! Crainte ! Effroi ! Emparez-vous de son âme ! Submergez-le ! Qu'il subisse une souffrance digne des Dieux ! Que son courroux soit interminable ! Obéissez à mes ordres, forces divines ! » 

Comme toutes ses incantations, ses mots n'étaient que des murmures, des souffles pourtant parfaitement audibles, comme amplifiés par sa propre puissance. Natsuki n'était pas du genre démonstratif, à ponctuer ses attaques et ses sorts de manifestations extravagantes ou tape à l'œil. Il préférait l'efficacité à l'esbroufe. Même son style d'épéiste flamboyant n'était pas là pour impressionner.

Au terme de la formule, l'énergie transformée en puissance physique se matérialisa, pour prendre l'aspect d'un rayon immaculé traçant à une vitesse régulière en ligne droite, avant de mourir contre un tronc. Deux semaines de pratiques quotidiennes lui furent nécessaire pour arriver finalement à ce résultat. Un sourire de satisfaction se dessina alors sur les lèvres du shinigami tatoué, avant de sentir sa tête tourner. Il posa un genou dans la terre molle, et inspira lentement quelques instants. Il se sentait à plat, comme s'il avait épuisé ses réserves. Il était parvenu à lancer le sort, c'est vrai, mais il y avait encore trop de dispersion de reiatsu au cours de l'incantation : il gaspillait plus d'énergie que nécessaire. Et déjà que ce sort était particulièrement gourmand... Natsuki n'avait pas une réserve extraordinaire de reiatsu, elle était dans la moyenne de ce que l'on attendait d'un shinigami de son rang. C'est ce qui lui fit réaliser vraiment l'écart existant entre lui et le marchand exilé. Cependant, lui savait très bien gérer son énergie pour l'exploiter dans les justes dosages en fonction de ses besoins. Maintenant qu'il avait trouvé la voie, ce n'était qu'une affaire de jours avant de maîtriser parfaitement l'ensemble.

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Il fallait trouver une solution : personne ou presque ne pouvait survivre à un sort pareil.

Après une semaine de pratique, il s'était penché à nouveau sur l'aspect un peu plus théorique. Les hollow qui parasitaient les corps s'attaquaient à des créatures relativement faibles, plus qu'eux en tout cas. Et au vu de l'état dans lequel Natsuki s'en était sortie, il n'était pas dur d'imaginer le résultat sur moins endurant que lui. Il devait donc trouver un moyen de concilier assez d'énergie pour expulser le hollow, tout en évitant que la victime ne décède ou de la peur panique que provoquait le sort, ou qu'elle ne succombe à la vague de douleurs qu'entrainait l'exorcisme.

S'il n'avait pas les connaissances et la logique des éminences grises de la Soul Society et des scientifiques exilés, l'assassin n'en était pas non plus un idiot. Le cerveau bien construit, il était lui aussi capable de réflexions poussées avec ce qu'il avait à sa disposition. Il était simplement moins... plus limité, en somme. Mais avec tout ce qu'il avait déjà sous la main, et sa maîtrise actuelle du nouveau kido, il savait qu'il pouvait trouver un moyen de pallier le problème majeur du sort. Kisuke aussi devait peut-être chercher une solution, s'il s'en préocupait un minimum. Mais cela n'intéressait pas le Vice-Capitaine. Car même si c'était le cas, il ne tirera presque rien de l'exilé, et devra se débrouiller avec ce qu'il observera sur le tas. Mieux valait qu'il ne compte pas sur lui, et apprenne tout ce qu'il pouvait de son côté. C'était son projet, initialement, c'était donc à lui d'améliorer la version prototype. Lui avait subit le sort, contrairement au scientifique, il était donc le plus à même de comprendre la souffrance, et de trouver comment la réduire. Urahara ne devait être qu'un ultime recours, et le restera tant que lui n'aura pas tout essayé avant d'aller le rencontrer à nouveau.